Violence et humanisation

Esprit de l’U.A.A.

Propice aux expositions extra-muros et à une forme de conscientisation à la banalité de la violence, Violence et humanisation est une U.A.A. moins évidente à traiter qu’il n’y parait. En effet, si elle semble claire au niveau de son objet (et encore la notion d’humanisation n’est pas aisée à manier), c’est bien au niveau de l’application de la démarche philosophique que les choses se gâtent. Bien entendu, si nous pratiquons régulièrement des dispositifs tels que les CRP ou les DVDP, la question essentielle sera de voir par quel chemin/objet on entamera le dispositif. En revanche, pour toute autre démarche, il y a là un risque non négligeable de réduire la séquence à une exposition de contenus vis-à-vis desquels tout discours pourra sembler une belle déclaration “convenue”. Est-ce un problème de faire de cette U.A.A. un séquence basée sur le contenu ? Absolument pas ! La question sera alors de trouver comment lui donner du sens ainsi qu’à l’approche des élèves…

Compétences

Problématiser la relation entre violence et processus d’humanisation.

Il s’agira essentiellement de montrer ce qui, dans la violence, engage le rapport à l’autre comme un rapport dépassant le cadre interpersonnel pour l’amener à une dimension plus profonde et essentielle qui engage son humanité et la considération qu’on a pour celle-ci.

Distinguer des situations où l’humain est envisagé en tant que sujet (fin en soi) et des situations où il est traité en tant qu’objet (moyen).

Il s’agira sur la base des différents événements historiques plus ou moins importants d’appréhender comment des individus ont été traité en regard de la dignité qui leur est inhérente.

Glossaire des notions

Violence : du latin violare, profaner, endommager, de vis force ; agir sur quelqu’un ou le faire agir contre sa volonté ; acte physique ou moral par lequel s’exerce cette force ; rupture brusque d’un ordre établi ou reconnu, qu’il s’agisse d’un ordre naturel ou d’un ordre politique, et moral. (source : Adelino BRAZ, La philosophie du droit, Paris, Ellipses édition Marketing, 2015, p. 191.)

Action d’humaniser quelque chose ; fait d’être humanisé : L’humanisation des conditions de détention. (Larousse) Humaniser : Rendre quelque chose plus humain, plus supportable à l’homme. (Larousse)

Pour plus de précisions sur les différents sens voir le Vocabulaire technique et critique de la philosophie (Lalande).

Dans la déshumanisation, la réalité (physique, psychique) est excessive, provoquant indifférence et incapacité de penser, d’imaginer. La préoccupation du corps et de ses besoins occupe tout l’espace psychique, tout le temps. Les signes identitaires s’effacent, annulant toute image de soi. Préserver sa curiosité, son désir, son intelligence est acte de résistance, de même qu’échapper à l’aliénation au présent, sans le fuir, par les actes gratuits, la créativité, le plaisir collectif. (source : Oppenheim, D. (2009). La déshumanisation, y résister, se déprendre de ses conséquences, en témoigner. Les Lettres de la SPF, 22, 73-78.)

Les philosophes disent que l’humanisme est une philosophie de l’homme dont les valeurs humaines sont au-dessus de tout. L’homme représente la valeur suprême et encore une fin, nullement un moyen. D’autres en font un mouvement intellectuel issu de la Renaissance, né en Italie au XIVe siècle, qui s’étend progressivement en Europe et s’épanouit au XVIIIe siècle. Pétrarque, Ficin, Pic de la Mirandole, Érasme furent les premiers et principaux représentants. Le retour aux textes antiques leur fournit un modèle de sagesse et de vie, un mode d’écriture et de pensée, imprégnés des Humanitas, les formes latines de transmission des connaissances. Les racines philosophiques sont suffisamment ambigües pour nous permettre de bâtir un socle solide, unique et inamovible. (source : Dorna, A. (2011). L’Humanisme : qu’apporte-t-il ?. Humanisme, 293, 16-17.)

Sujet : Sens philosophique. Être ou principe actif susceptible de posséder des qualités ou d’effectuer des actes. (CNRTL)

Objet : Sens philosophique. Ce qui a une existence en soi, indépendante de la connaissance ou de l’idée que peut en avoir l’être pensant. (CNRTL)

Le 10 décembre 1948, les 58 États Membres qui constituaient alors l’Assemblée générale ont adopté la Déclaration universelle des droits de l’homme à Paris au Palais de Chaillot (résolution 217 A (III)). Pour commémorer son adoption, la Journée des droits de l’homme est célébrée chaque année le 10 décembre. Ce document fondateur – traduit dans plus de 500 langues différentes – continue d’être, pour chacun d’entre nous, une source d’inspiration pour promouvoir l’exercice universel des droits de l’homme. (Site des Nations Unies)

La socialisation désigne le processus par lequel les individus intègrent les normes, les codes de conduite, les valeurs, etc. de la société à laquelle ils appartiennent. (source)

Ensemble des formes ou des structures politiques, telles qu’elles sont établies par la loi ou la coutume et qui relèvent du droit public. (Larousse)

Organisme public ou privé, régime légal ou social, établi pour répondre à quelque besoin déterminé d’une société donnée. Ensemble des structures politiques et sociales établies par la loi ou la coutume et qui régissent un État donné. (CNRTL)

Acte(s) d’agression commis volontairement à l’encontre d’autrui, sur son corps ou sur ses biens. (source)

Ce qui autorise à rassembler sous le concept unique de violence des actes qui ont une matérialisation physique et d’autres qui n’en ont pas, c’est donc la souffrance subjective de celui qui subit. Outre son éventuelle incidence corporelle, elle comporte toujours une dimension proprement psychologique : l’anxiété de se sentir vulnérable, le sentiment diffus (ou trop éclatant) d’être mis en infériorité. (source)

Pierre Bourdieu y recourt [au concept de violence symbolique] fréquemment dans divers travaux sur l’éducation, les jugements d’ordre esthétique, la domination masculine. […] il l’utilise surtout comme antonyme de la violence ouverte. Quand il se risque à la définir plus précisément, il la qualifie de « violence douce, invisible, méconnue comme telle, choisie autant que subie, celle de la confiance, de l’obligation, de la fidélité personnelle, de l’hospitalité, du don, de la dette, de la reconnaissance, de la piété, de toutes les vertus en un mot qu’honore la morale de l’honneur… ». Selon les contextes d’emploi, il s’agit donc soit de ce que Joan Galtung appelle la « violence structurelle », par opposition à la violence intentionnelle des personnes, soit d’une « violence psychologique » que Pierre Bourdieu s’interdit de nommer comme telle mais qui rappelle à l’évidence certaines pages célèbres de Mauss. (source : Braud, P. (2003). Violence symbolique et mal-être identitaire. Raisons politiques, no<(sup> 9), 33-47.

Séquence

Dispositif : Invitation à l’errance

A cause d’un thème et d’un objet qui risque de paraitre “lourd” dans un traitement classique, il semble judicieux de proposer une approche qui permette un savant mélange entre échange et introspection. Si la question de la violence et de ses effets peut faire l’objet d’une réflexion qui vise la juste mise à distance, une approche plus affective apparaît tout aussi pertinente à condition qu’elle ne vire pas au tire-larmes. Interrogation spontanée face à la violence du monde ne rime donc pas avec surenchère. Mais comment arriver à ce subtile mélange ? Comme indiqué en présentation, par la visite de sites dédiés, par la rencontre de témoins, par la conscientisation qui ne se veut pas uniquement moralisatrice…

Le présent dispositif se présente comme un ensemble d’ateliers dans lesquels les élèves passent librement en autonomie en prenant des notes ou non sur une feuille ou un petit carnet dédié. Il suppose un certain agencement de la classe propice au déplacement afin que chaque élève puisse se balader d’un endroit à l’autre. On pourra également prendre le temps de penser une certaine “scénographie” de la mise en place des ateliers afin de rendre le dispositif davantage immersif comme, par exemple, une impression en grand des images et une mise en scène semblable à celle des expositions. Les coins lectures peuvent également être agrémenté d’un coussin ou l’autre afin de renforcer l’idée qu’on peut y prendre le temps de lire. Enfin, les témoignages vidéo peuvent être affichés en grand sur le tableau/tv interactive mais disponible uniquement à une seule personne qui pourra mettre le casque sur ses oreilles et ainsi entendre ce que raconte la vidéo. Pour l’avoir organisé en classe, l’image en grand de ces personnes qui nous regardent mais dont on n’entend pas les mots invitent véritablement à les écouter.

Le présent dispositif est appelé à évoluer et à être complété à l’avenir, il ne faut donc pas hésiter à y ajouter des éléments et à en retirer en fonction des facilités ou contraintes matérielles. La seule “règle” qui puisse valoir est celle d’un équilibre des types d’ateliers pour offrir une véritable sensation de changement d’un atelier à l’autre.

Quelques vidéos sur les notions de violence

Marc Crépon sur la violence

Denis Mukwege

Francine Cristophe

Quelques idées de lecture