Fool night
Bioéthique dystopique
Récit se déroulant dans un futur proche, Fool night, première œuvre du prometteur Kasumi Yasuda, postule la disparition du soleil ou plus précisément son absence dû à un immense nuage noire qui recouvre la Terre. Privées de lumières, les plantes n’existent plus ce qui pose le problème de la production de l’oxygène. C’était sans compter sur la capacité des êtres humains à trouver des solutions techniques à leurs problèmes. Cette solution s’appelle la transfloraison et elle consiste à implanter une graine dans le corps d’un humain qui, petit à petit, se transformera en une plante capable de produire de l’oxygène mais ne nécessitant pas de photosynthèse. Malgré la tension ambiante dans une société qui n’a plus vu depuis plus d’un siècle le soleil, les règles de la transfloraison sont strictes. Seules les personnes volontaires et atteintes d’une maladie incurable peuvent devenir des sanctiflores en échange d’une forte somme d’argent.
C’est donc dans ce contexte que nous suivrons le quotidien de Toshiro, un jeune homme pauvre dont la vie est marquée par les inégalités de cette société dystopique à bien des égards. Devant s’occuper d’une mère qui n’a de cesse de vouloir le tuer quand elle fait des crises, le jeune Toshiro n’a pu faire les études qui lui auraient permis de trouver une meilleure place dans la société. Coincé dans un travail où la moindre erreur lui vaut des pertes de salaire, il essaie tant bien que mal de s’en sortir en économisant malgré qu’il soit conscient des années nécessaires pour obtenir la somme suffisante à la reprise des études. Ce projet sera tué dans l’œuf par sa mère qui, lors d’une énième crise, finira par le poignarder. Cet événement sera le déclencheur de son envie de se faire transflorer pour trouver ce qu’il appelle “une richesse intérieure”. Au cours de ses démarches, il retrouvera son amie d’enfance qui, après plusieurs refus, sera dans l’obligation de transflorer Toshiro vue la détermination de celui-ci. C’est alors que le jeune condamné s’apercevra qu’il est capable d’entendre les sanctiflores qui l’entourent. Un pouvoir jamais vu qui attirera convoitises et intérêts.
Œuvre à la proposition fertile et à l’univers propice aux questionnements philosophiques et politiques, Fool night est un récit dur qui parle d’inégalité et de violence. Omniprésente dans le récit, la violence prend toutes les formes possibles ce qui en fait un manga à la fois “lourd” par les thématiques (violence psychologique, suicide, maltraitance infantile) qu’il traite et la manière directe qu’il a de les aborder. Loin d’être gratuite, cette violence sert toujours un point de vue, un éclairage sur les relations entre les personnages et la société, qui évite à l’intrigue de ne s’enfermer dans une surenchère gratuite et hors-sujet.