Légal et légitime : La relation du légal et du légitime recouvre en principe, celle qu’entretient le droit avec la morale : le légal renvoie à ce que est conforme à la législation, et dans le cas présent à une législation normative juridique. En ce sens, le légal concerne ce qui est en adéquation du point de vue extérieur avec la loi, ce qui implique que le légal ne s’occupe que de légiférer l’action et non l’intention, et cela dans un cadre normatif qui soit le même pour tous. Le légitime s’inscrit lui dans une normativité morale qui ne se conjugue pas nécessairement avec le légal. Dans ce cas, le légitime concerne la conformité du point de vue de l’intention, donc interne, entre l’action et la norme morale. […]
Adelino BRAZ, La philosophie du droit, Paris, Ellipses édition Marketing, 2015, pp. 188-189.
Or la question de la légitimité est extrêmement complexe, et cela tient en premier lieu à la plurivocité du terme « légitime ». Il existe surtout une considérable ambiguïté, du fait que « légitime » signifie à la fois « fondé en droit » et « fondé parce qu’équitable ou juste ». Or, ce n’est pas du tout la même chose d’affirmer qu’une autorité ou qu’un jugement sont indiscutables parce qu’ils sont légaux, et d’affirmer qu’ils le sont parce qu’ils sont équitables ou justes. Si elles peuvent être unies dans la même autorité ou dans le même jugement, la loi et la justice sont par nature différentes ; elles sont même susceptibles d’être en désaccord : la loi peut être inéquitable ou injuste, l’équitable ou le juste peuvent être hors la loi. On voit combien cette importante équivoque révèle que la notion de légitimité est à la fois juridique et morale, deux ordres ou domaines profondément différents (le Droit définit ce qui est licite ou illicite, la morale statue sur ce qui est bien ou mal).
Thierry Ménissier, éléments de philosophie politique, Ellipses Édition Marketing, Paris, 2018, p. 101.