Le château des animaux

Prenant place dans ce qui s’apparente à une suite non officielle de la ferme des animaux de George Orwell, Le château des animaux, raconte l’histoire d’une troupe d’animaux de fermes comprenant également, chat, chiens et taureau qui vivent dans un château.
Dès les premières planches, le ton est donné et l’on se rend vite compte du caractère totalitaire de l’organisation politique de la vie au château. Prenant appui sur des différences liée à la nature, Silvio, leader modestement suprême, est placé en haut de la hiérarchie par sa force de taureau.
Dans cette “République” qui n’en porte que le nom l’ordre est assuré par les chiens toujours selon cette répartition naturelle. L’ordre en place est donc institué par la force et tente de tirer sa légitimité de la protection qu’il offre face aux loups (qu’on n’a toujours pas vu d’ailleurs), ceux-là mêmes auxquels serait favorable toute remise en cause de l’ordre établi, paraît-il.
La narration s’attarde particulièrement sur Miss B, seule chatte du domaine, dont la tête s’emplit de plus en plus d’un sentiment d’injustice face à l’iniquité de l’organisation du travail et de la répartition des ressources. A l’occasion de plusieurs rencontres et autres événements importants dans l’histoire de la République, Miss B entrera en résistance s’essayant à la désobéissance et formatant de gentils attentats dont le but premier est d’écorner l’image du pouvoir.
Comptant deux tomes au moment où j’écris cette chronique, la BD, dont on ne peut que reconnaître les qualités graphiques, est pré-publiée sous forme de gazette dont la première et la quatrième de couverture apportent une saveur particulière en ce qu’elles résument des événements avec les mots du pouvoir. S’il va sans dire que cette excellente BD est à lire et à faire lire, il me faut ajouter une précision importante.

Le lecteur instruit remarquera la similitude de certains personnages avec des acteurs et autres figures de la contestation, de la désobéissance civile ou de la non-violence comme Gandhi. Aussi, au détour d’une situation, des éléments de philosophie politique, tels que certains clin d’œil à l’œuvre de Machiavel (on pense au climax de la fin d’un tome 2 plutôt axé sur les discussions au sein du pouvoir), sont parfaitement illustrés par le récit. Il serait alors dommage de ne lire et ne faire lire cette bande dessinée qu’à l’aune d’une volonté de décalque des grands penseurs à l’instar de ces ouvrages de pop philosophie qui en ont fait leur spécialité.
L’histoire, la mise en scène, les problèmes rencontrés, mais surtout les dialogues sont suffisamment riches et offrent un document d’une qualité rare qu’il n’est pas utile de le réduire à une forme de picotage autour de références conceptuelles…Beau, malin, inspirant, bien écrit, vous l’aurez compris, je recommande absolument.
