Carbone & Silicium

Œuvre de science fiction dont Damasio ne cesse de faire l’éloge, Carbone et Silicium a un peu divisé la critique BD entre ceux qui adorent et ceux qui trouvent qu’on en fait trop pour ce récit sur le temps long.

Partant d’une intrigue sur le devenir de deux intelligences artificielles, qui portent le nom de la matière de leur corps, Carbone et Silicium sont deux êtres qui n’auront de cesse de se retrouver au fur et à mesure de l’évolution des Hommes, de la planète, bref d’un futur lointain. Si quelques rebondissements liés aux créateurs et aux super-corporations rythment le début du récit, la dimension métaphysique et philosophique prend très rapidement le pas pour nous offrir, au travers de ses personnages, des réflexions sur la vie, l’altérité, le changement, l’apprentissage.

La narration se découpe en tableaux espacés de plusieurs années voire dizaines d’années et s’articule autour des retrouvailles d’une Carbone qui change sans arrêt de corps tout en se mêlant aux autres alors que Silicium, qui a gardé son corps d’origine, parcourt le monde à la manière d’un ermite. Chaque rencontre devient alors l’occasion d’un état des lieux et d’un échange sur le sens de la vie, de la finitude, du corps, du temps etc.

On comprend facilement l’agacement de celles et ceux qui trouvent abusé le fait de crier au génie. Car si le récit est riche dans la variété de ses approches, elles ne sont jamais véritablement explorées à fond. On reste généralement à la surface et c’est justement ce qui en fait une très bonne BD à mon sens. En ne donnant pas toutes les clés de lecture, en ouvrant des débuts de réflexion qu’elle referme parfois aussitôt, Carbone et Silicium est une histoire qui met en avant les questionnements de son auteur plutôt que ses réponses.

Côté dessin et esthétique, on retrouve le style de Bablet avec une bien meilleure lisibilité des visages (gros défaut de son néanmoins très bon Shangri-La). Si les personnages peuvent être déroutants par leur traitement graphique, la mise en couleur est quant à elle somptueuse et pose des ambiances très singulières qui font la particularité de chaque moment du récit.

Pour finir de recommander cette bonne BD qui pourrait intégrer n’importe quelle bibliothèque d’école, il faut mettre en avant son prix qui est plus que bon marché (par rapport au reste du marché justement) car avec près de 270 pages en couleur dans un format qui dépasse le A4 pour 23€… on se demande comment les éditions Ankama font pour s’y retrouver…

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