Capitale

Frans Masreel est un graveur sur bois belge né en 1889 à Blankenberge et mort en 1972 à Avignon. Il est notamment connu pour ses romans sans paroles dont l’un des plus célèbres, Idée, fût adapté en film d’animation par Berthold Bartosch en 1932.

Au-delà de la maîtrise de son art, Masereel est un auteur très intéressant à lire tant il est un rapporteur sans concession des espoirs, mais aussi des errances de son temps. Par “son” temps, il faut entendre plus précisément les luttes ouvrières et les conditions de vie des classes laborieuses de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle.

Dans Capitale l’artiste propose une ingénieuse description des grandes villes à travers ce qu’y font les habitants, leurs mœurs, leurs valeurs, mais aussi à travers l’agencement des rues, des immeubles et autres détails de la vie urbaine. Loin d’une collection de faits plus ou moins explicitement énoncés, Capitale se déroule selon un séquençage autour de successions d’images – qui vont le plus souvent par deux – où s’offre un subtile jeu d’appel contre-appel. Ainsi, dans un style qui n’est pas sans rappeler Senpé bien que le livre lui soit antérieur, chaque image bordée de sa petite légende ouvre ou répond à celle qui lui succède ou la précède. Il ressort de cette alchimie une incroyable fluidité ponctuée de moments où la pensée prend forme à la fois sous nos yeux et dans le séquençage propre à ce style. D’ailleurs, et c’est là une force de l’ouvrage, chaque image n’est imprimée qu’au recto des pages renforçant, de ce fait, l’effet de surprise.

Au-delà de ces caractéristiques esthétiques et éditoriales, on notera également une variété rare – voire même une actualité – des thématiques abordées dans l’ouvrage. Thématiques qui, si elles ne sont pas approfondies, imposent la réflexion tant l’harmonie entre la gravure, le texte et le rythme est grande… Un magnifique ouvrage en somme qui a beaucoup plus de choses à raconter qu’il ne peut y paraitre.

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