Le sentiment amoureux est une émotion universelle, hors du temps et non soumise à la culture.

Alors que l’histoire de l’amour canalise cette émotion pour l’intégrer dans des voies de communication sociales, cette histoire prend la forme que lui donne sa culture et que l’individu digère pour en faire sa propre valeur. L’attachement, lui, se tisse au gré des pressions extérieures. Ce lien subit la force des structures sociales, de l’organisation des familles, de l’architecture de la maison et de l’urbanisation des quartiers.

Ce lien intime s’organise au gré des pressions écologiques et fantasmatiques, où les interactions quotidiennes, par leur durée et leur répétition donnent sa puissance au banal.

L’amour est une surprise qui nous arrache à l’insipide, l’attachement est un lien qui se tisse au quotidien.

Boris CYRULNIK, Sous le signe du lien, Hachettes, 1989, p. 174.


Pourquoi faut-il que l’autre « ait quelque chose », qu’il éveille en nous une impression de charme, un plaisir à le regarder, à l’écouter et le sentir. La séduction passe par un canal sensoriel : l’œil, l’oreille ou le nez. Ces canaux de séduction sensorielle constituent une sémiotique du corps qu’utilise l’homme.

Quand on observe dans notre histoire la quantité invraisemblable d’argent, de temps et de techniques consacrés aux maquillages, aux vêtements et aux bijoux, on se dit que tous ces efforts doivent bien avoir un sens, assumer une fonction !

Les ornements fugaces, tels que le maquillage, la poudre sur les joues ou la peinture sur les lèvres permettent de modifier rapidement notre apparence émotionnelle. Le changement de vêtements, le port de bijoux, le parfum avant de sortir, révèlent notre intention de déclencher chez les autres une émotion différente… « ce soir-là ». L’enjeu sexuel et social change de forme : il ne s’agit plus de s’habiller comme au travail, il faut maintenant se décorer pour donner de soi une autre image. Ces apprêts sont fugaces. Quelques heures plus tard, le charme du parfum évaporé, la robe froissée et le maquillage négligé n’auront accordé à ce contrat social qu’un apparat de quelques heures.

Boris CYRULNIK, Sous le signe du lien, Hachettes, 1989, p. 210.

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