C’est la position de l’anarchisme, qui repose sur l’idée que la société se débrouille très bien, mais aussi beaucoup mieux sans l’État. La seule manière d’assurer la liberté des individus est de réduire, voire de détruire, toutes les formes de domination étatique. Pour l’anarchisme, aucune domination n’est jamais nécessaire, et l’ordre social existe mieux sans elle. Il y a d’ailleurs deux manières d’y parvenir : soit en pariant sur l’égoïsme et l’intérêt bien compris des individus (ce sont les théories du marché et de la « main invisible »), soit en misant sur des mécanismes puissants de solidarité et de coopération politique (ce sont le mutualisme et l’organisation en coopérative). La première manière, basée sur une conception de l’homme égoïste, donne l’anarchisme de droite (ou néolibéralisme) ; la seconde, l’anarchisme de gauche, est fondée sur une anthropologie altruiste et collaborative. Malgré toutes leurs nombreuses différences, l’une et l’autre se retrouvent sur l’idée que l’État est un parasite inutile et nocif.
Pierre-Henri TAVOILLOT, Comment gouverner un peuple roi ?, Traité nouveau d’art politique, Paris, Odile Jacob, 2019, p. 29.