Il est bien connu qu’il est difficile de définir le terrorisme. Pour les juristes, il a la particularité de désigner un but (terroriser) et non une valeur à protéger (l’incrimination de vol renvoie à la protection de la propriété, celle de meurtre de droit à la vie). En fait, il s’en prend tout aussi bien aux personnes, aux biens qu’à la fonction plus générale de l’état d’assurer la sûreté définie par la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 comme étant l’un des quatre droits naturels et imprescriptibles de l’homme (la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression). On voit immédiatement qu’il peut y avoir une contradiction entre la sûreté et le droit de résistance à l’oppression, mais sous la Révolution française c’est la sûreté qui a légitimé le recours à la terreur contre les ennemis de la révolution.

L’évolution du terme « terrorisme » est significative. Pendant son premier siècle d’existence, il a servi à désigner la terreur exercée par l’état contre ses adversaires aussi bien dans une logique révolutionnaire (la terreur dite robespierriste) que contre-révolutionnaire (la terreur dite blanche). Le terrorisme a d’abord été le recours à des procédures d’exception, c’est-à-dire limitant ou supprimant radicalement les libertés publiques et les garanties judiciaires pour aboutir à un pur arbitraire meurtrier. Cet usage se trouve par exemple dans l’expression « terreur stalinienne ».

Ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle que le concept de terrorisme a servi à définir la violence exercée contre les personnes, les biens et l’appareil d’état. Les premières occurrences concernaient les anarchistes qui s’en prenaient aux symboles de la société bourgeoise et aux révolutionnaires russes qui attaquaient les représentants du pouvoir tsariste. Le tout se faisait en revendiquant la résistance à l’oppression.

Henry LAURENS, Orientales, Paris, CNRS éditions, 2019, p. 1761.

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