A l’époque moderne, les concepts de jusnaturalisme et de juspositivisme acquièrent une importance cruciale dans la philosophie du droit. Aujourd’hui encore, nombre de juristes définissent leur position en fonction de la base sur laquelle reposent, selon eux, les lois, qu’il s’agisse de la raison ou d’un simple pacte.

Le courant jusnaturaliste considère qu’outre les lois positives qui régissent un pays, il existe une série de valeurs et principes inscrits dans la nature humaine et, par conséquent, communs à tous les hommes, auxquels toute loi doit se conformer. Il s’agit de principes moraux universels, que tout individu peut connaître grâce au bon usage de sa raison (faculté qui ne doit pas être confondue avec la possession de connaissances théoriques ou techniques). Tout au long de l’histoire de la philosophie, cette position a été défendue par des penseurs illustres comme les grecs Platon et Aristote, le scolastique Thomas d’Aquin et, bien sûr, John Locke. Tous croyaient avoir trouvé dans les injonctions de la raison une base sûre pour fonder leur système politique.

Face aux certitudes apparentes du jusnaturalisme, le juspositivisme ne reconnaît aucune référence naturelle aux normes du droit, livrant ainsi cette discipline aux exigences de la prudence et de l’utilité. Opposés à une correspondance entre les injonctions juridiques et les commandements moraux, les penseurs juspositivistes soutiennent que les lois émanent exclusivement d’accords historiques et concrets entre les hommes liés entre eux par les obligations imposées par le pacte. Les lois peuvent être inspirées par certaines idées abstraites sur la justice, mais, en fin de compte, elles répondent aux nécessités et aux intérêts des individus : elles sont une réponse dictée par les circonstances historiques. Ainsi, les normes légales ne peuvent être appréciées que depuis cette perspective et en fonction de leurs répercussions plus ou moins efficaces sur la société pour laquelle elles ont été élaborées. Parmi les défenseurs du juspositivisme figurait un illustre contemporain de Locke, Thomas Hobbes.
LOCKE, L’État a le devoir de protéger les droits et libertés des citoyens, coll. Apprendre à philosopher, Paris, RBA, pp.132-133.