Diversité des discours sur le monde

Esprit de l’U.A.A.

Complétant à merveille l’U.A.A. Discours et pièges du discours, Diversité des discours sur le monde aborde d’une autre manière la question de la portée des discours et leurs conséquences sur notre rapport au monde. S’il s’agit toujours de développer directement une forme d’esprit critique lié au langage et aux discours, l’attention sera particulièrement focalisée sur l’existence de discours appartenant à des “champs” différents et dont les prétentions peuvent se recouvrir. Autrement dit, il s’agira de montrer comment des régimes de vérités différents liés à des manières d’appréhender le monde peuvent se compléter ou entrer en concurrence de manière légitime ou non. C’est le cas, par exemple, d’objets tels que les expériences de mort imminente qui font l’objet de plusieurs disciplines ayant chacune leur spécificité (la science, la philosophie, la religion, …) et pouvant arriver à se contredire… à moins que ces contradictions ne soient la marque d’un discours qui porte sur des objets qui ne le concernent pas.

Compétences

Distinguer différents discours sur le monde et les types de vérité qui peuvent leur être associés.

Il s’agira essentiellement de repérer et d’identifier dans des “phénomènes” faisant intervenir des zones d’ombres, les différents types de discours qui entrent en jeu ainsi que leur propension à décrire ces phénomènes selon leurs outils et à prétendre à la vérité.

Questionner les possibilités d’articuler différents discours sur le monde.

Il s’agira sur la base des différentes types de discours d’identifier comment ils se complètent ou entrent en concurrence au sujet d’un phénomène complexe. Il s’agira aussi d’appréhender le bien fondé de cette concurrence quand elle est revendiquée par l’un ou l’autre type de discours.

Distinguer savoir et croire.

Il s’agira de définir et d’être capable d’appliquer les notions de croire et de savoir (ainsi que les notions gravitant autour).

Glossaire des notions

Objectif : Dont la réalité s’impose à l’esprit indépendamment de toute interprétation : S’en tenir à la réalité objective. Qui ne fait pas intervenir d’éléments affectifs, de facteurs personnels dans ses jugements.

Subjectif : Qui relève du sujet défini comme être pensant, comme conscience individuelle, par opposition à objectif.
Se dit de ce qui est individuel et susceptible de varier en fonction de la personnalité de chacun : Une interprétation subjective d’un texte.

Dans la langue courante, croire renvoie aussi bien à l’assentiment que l’on donne au vrai qu’à celui qu’on peut donner au faux, dans le cas de l’erreur ou de l’illusion. Croire, ainsi, c’est tenir pour vrai, sachant qu’il existe différents degrés entre ce qu’on tient pour probable et ce à quoi on croit comme à un dogme.

Le verbe savoir indique une compétence pratique (savoir nager par exemple) ou renvoie à une certitude qui peut indiquer sa propre justification et indique une connaissance non seulement certaine mais vraie. À proprement parler, savoir, c’est savoir qu’on sait et pouvoir en donner des raisons objectives. (Source : Philippe Ducat, Jean Montenot, Philosophie le manuel, 4e édition, Paris, Ellipses Marketing Éditions, 2020, p. 684.)

Discours scientifique : Par scientifique, on entend les recherches faites dans le cadre des sciences naturelles (physique, biologie, chimie, etc.) ou humaines (histoire, sociologie, sciences économiques, etc.).

Discours religieux : Par religieux, on entend un ensemble de dogmes et les rites qui leurs sont associés.

Discours judiciaire : Par judiciaire, on entend tout ce qui touche aux lois et de là à l’administratif (papiers officiels etc.).

Discours esthétique : Par esthétique, on entend tout ce qui touche à la perception et la sensation du beau ou qui répond à des exigences ou à des lois de beauté.

Discours symbolique : Le discours symbolique est l’expression d’une idée, d’une opinion ou d’une émotion par des moyens non verbaux ou non écrits. Cela inclut des actes tels que la participation à une manifestation, un sit-in ou un défilé, l’agitation de drapeaux ou de bannières, ou la tenue de pancartes, et le port de macarons de protestation ou de vêtements expressifs. (source)

Discours éthique : Par éthique, on entend tout ce qui touche aux valeurs, à leurs conflits et aux comportements (mœurs) des personnes.

La notion de types de vérité renvoie à la multiplicité des rapports à la notion de vérité qui varient en fonction de son fondement et de sa fondation.

Par exemple (et en très concis), la vérité-correspondance suppose que la vérité consiste en une adéquation avec le réel là où la vérité-révélée suppose une vérité déjà établie qui est révélée le plus souvent à l’humain.

(Libération) En un sens négatif de l’aliénation, la libération se définit par la réappropriation des éléments devenus étrangers au sujet. Cette réappropriation n’est pas nécessairement matérielle, mais peut également être comportementale dans le cas d’un rapport à la technique.

Séquence : En guise d’accroche

Partant d’un extrait du film Le Hobbit 3 : La bataille des cinq armées, nous plaçons les élèves dans deux camps opposés concernant une affaire de propriétaire d’objets vendus aux enchères. En effet, dans cet extrait, Bilbo doit arriver à convaincre qu’il n’est pas mort afin de récupérer ses affaires qui sont vendues aux enchères. Le groupe est donc divisé en deux et, après deux visionnages de la séquence, il est demandé à chaque groupe de chercher des arguments en faveur ou en défaveur (selon qu’il a été assigné pour ou contre) du fait de “rendre” ou non les affaires à Bilbo. Au-delà de l’intérêt de permettre aux élèves d’être créatifs dans leur mauvaise foi, cet exercice renforce la capacité à argumenter des élèves en ce qu’ils doivent être particulièrement attentifs aux failles des arguments de l’autre groupe (voir vidéo Mercier dans les ressources pour cet aspect de l’argumentation).

En plus de la dimension argumentative, cette accroche permet de présenter, en leur donnant corps, les éléments constitutifs des notions centrales de l’U.A.A. telles que : croire et savoir, objectif et subjectif, preuve, fait et opinion.


Premier arrêt : Définitions des notions

Partant donc de cette approche en forme de jeu de rôle, il s’agira de présenter et d’exercer à la reconnaissance des différentes notions importantes dans cette séquence. On pourra alors exercer à l’aide d’exercices dédiés (objectif / subjectif) ou au travers d’une discussion sur des phénomènes et questions complexes pour le couple croire / savoir : existence des esprits ou des extra-terrestres, sentiment de réussite à une évaluation, confiance accordée à une personne.

Petite précision : si la notion de croyance est assez facilement compréhensible dans son assertion commune, il apparaît, dès qu’on commence à se pencher sur celle-ci, que des différences subtiles peuvent émerger voire être contradictoire comme le fait que la croyance peut renvoyer à une forme de certitude comme d’incertitude. Afin de préciser cette notion, on peut commencer par distinguer la croyance comme acte de cognition général qui est utilisé dans la vie de tous les jours – “je crois qu’il reste du lait dans le frigo”, “je crois que cette séquence devrait intéresser les élèves” – d’un objet plus complexe qui fait intervenir d’autres aspects comme, par exemple une dimension sociale comme : “je crois qu’il existe une entité supérieure qui a créé le ciel et la terre”. A ce titre le livre de Sebastian Dieguez Croiver est particulièrement éclairant sans être trop ardu.


(Longue) Transition : Le cas des expériences de mort imminente

Pour faire le lien entre les notions précédemment abordées et les types de discours d’une manière qui soit fluide et qui ne réduise pas cette séquence à une présentation d’un ensemble de concepts, nous abordons le très engageant cas des expériences de mort imminente. A partir du découpage d’une émission de la RTBF, nous proposons un questionnaire qui a pour but de focaliser l’attention des élèves sur les éléments qui gravitent autour de notre U.A.A. L’idée n’est donc pas de s’assurer de l’attention des élèves en général (nul besoin de le coter), mais bien plutôt de s’assurer qu’ils repèrent des éléments précis dans le discours des intervenants.

Par sa forme (et la présence d’une partie brouillon) le visionnage peut se faire en classe comme à domicile. Il sera ponctuer par une réflexion sur ce qu’on peut dire des E.M.I Discussion autour de laquelle il s’agira davantage de délimiter les champs des différents discours rencontrés plutôt que d’ergoter sur l’existence d’une vie après la mort (ce qui n’empêche nullement de critiquer la soi-disant preuve de cette existence donnée par l’anesthésiste ce qui, au passage permet de faire un rappel sur l’argument d’autorité s’il a été vu).


Deuxième arrêt : Les types de discours

Profitant donc de l’immense terrain de jeu qu’a fourni la problématique des E.M.I. nous abordons et présentons les différents types de discours en veillant à les identifier rétrospectivement dans le documentaire. Afin de s’assurer de la bonne compréhension des singularités et des différences entre les types de discours, nous réalisons un exercice assez formel qui permettra de repérer les précisions nécessaires pour s’assurer de la bonne compréhension de l’ensemble de la classe.


En guise de sortie : Une incroyable expérience grandeur nature

Illustration parfaite de ce que nous avons réalisé tout au long de la séquence, l’expérience des crop circles réalisée par un groupe de zététiciens complétera de manière étayée les différents aspects de la réflexion. Dans cette série de vidéo (d’environ une heure chacune), un groupe de personnes s’est mis en tête de réaliser un faux crop circle (dessin dans un champ) et de rester sur le lieux en caméra caché afin d’échanger avec les les badauds et les spécialistes du paranormal. L’avantage de cette série de vidéo est qu’elles n’ont jamais pour but de se moquer des personnes curieuses et qu’elles mettent un point d’honneur à distinguer ce que prouve leur démarche (des spécialistes sont des charlatans) de ce qu’elle ne prouve pas (l’inexistence des extra-terrestres).

Quelques vidéos sur les types de discours

Ugo Mercier sur la crédulité

Entretien avec Gérald Bronner

Une expérience à faire dans ses classes

Quelques idées de lecture